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Rai de lumière

Un peu de poussière virevolte, dans le rai de lumière posé sur mon flanc. Ça frétille au gré de ma respiration souple et lascive. J’aime ça. Le soleil est printanier, il apporte des teintes fruitées et fleuries dans l’air, tout à l’heure, j’irai goûter le mousse fraîche à l’ombre d’un arbre. Ce parfum, cette douceur, j’aime ça aussi. Dommage qu’il ne fasse pas un tout petit peu plus chaud. J’ai vu, hier, le chien voisin claudiquant vers sa gamelle d’eau. Ça ne m’étonne pas, dormir dehors quand c’est aussi humide, c’est la garantie de mourir tôt. Ne croyez pas pour autant que je m’apitoie sur son sort, je ne l’aime pas, et mes étés seront d’autant plus tranquilles si la vie m’en débarrasse.
Le rai de lumière s’est légèrement déplacé. Chose naturelle. De mon ventre qui n’est plus irradié, un léger frisson a couru, un tressaillement. Mes yeux se ferment, mon âme s’enfonce dans quelques limbes inconnus, plutôt doux. Un léger tic tac me berce depuis le salon adjacent où quelqu’un s’affère. Au loin, la voix de Manon qui joue, certainement avec sa poupée. Je dois beaucoup de ma tranquillité à ce curieux objet, et l’en remercie, si l’on peut dire. Je repense à ce chien, le pauvre. Il y en avait un ici. Avant. J’étais jeune, il faisait très attention à moi. C’est, je crois, le seul cabot que je n’ai jamais pu voir ailleurs qu’en peinture. Quoique… Même en peinture.
J’ai raté le coche. Ces quelques digressions m’ont fermé la porte du sommeil, et le rai de lumière s’est déplacé suffisamment pour m’empêcher de faire danser la poussière en suspension.
C’est agaçant.
Je devrais m’étirer et changer de lieu de dilettante. Attendre encore un peu.

La porte de la chambre de Manon s’ouvre et je l’entends claquer. Il ne m’en fallait pas plus. Je m’étire, bâille comme une momie égyptienne, secoue légèrement les moustaches. Ça réveille.
Je me lève, et suis déjà en train de traverser la pièce quand Manon me saute au cou. Je râle.
« Manon ! Arrête d’embêter le chat !
- Mais, Maman, je lui fais juste un câlin ! »
L’intervention de la nourricière me permet de m’esquiver, je file à travers les chaises. Hors de portée de Manon, je me retourne.
Je l’aime.

Commentaires

Blue a dit…
Je laisse le soin à Lafailli de trouver d'où me vient l'idée :p
Anonyme a dit…
moi je triche je lis le com avant le texte quand c'est trop long, je reviens tout à l'heure pour le lire ... et je reponds !
Anonyme a dit…
lu !
génial ! je vais lui lire à Yona ce soir, elle va aimer
j'aime bien le "attendre encore un peu."


http://lafailli1.hautetfort.com/_chat/
Blue a dit…
Merci :)

une petite griffouille de circonstance à Yona :)
Anonyme a dit…
re waouw! C'est bien ce que je pensais, t'as la fibre littéraire:o)
Balmeyer a dit…
C'est très bon ! Une alternance entre billets très courts et d'autres plus, c'est très intéressant.
Blue a dit…
Merci ! toi qui me bat* !

Pour tout dire, ce 'principe' (auquel je ne suis pas sûr de tenir, car je suis aussi fiable qu'un président de la République en campagne électorale) me trottait à l'esprit depuis un moment et je profite d'avoir le temps libre nécessaire pour le mettre en oeuvre.

Comme disait l'autre...

Pourvu qu'ça dure.




*Oui, je sais c'était facile :$

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